Derniers travaux de la commission consultative paris-orly
Après plusieurs réunions et ateliers avec la participation des Élus, Présidents d’association et Professionnels ; la dernière Commission Consultative de l’Environnement (CCE) de l’aérodrome d’Orly du 9 février 2024 s’est terminée avec comme conclusions de l’Étude d’Impact selon l’Approche Équilibrée (EIAE) un choix entre 3 scenarii possibles.
L’étude EIAE a été placée sous l’autorité indépendante de la Préfète du Val de Marne en mai 2023 et a rendu ses conclusions lors de la Commission Consultative de l’Environnement le 9 février 2024.
Celle-ci conclut à 3 scénarios possibles en complément du scénario « fil de l’eau » en travaillant sur l’interdiction des avions selon leurs niveaux acoustiques et la plage de restrictions (couvre-feu) :
Scénario A : Restrictions sur la marge et les niveaux de bruit certifiés
– Interdiction des M<13 dès 22h
– Interdiction des aéronefs avec niveaux de bruit certifiés à l’approche supérieur à 97 EPBdB et au
survol à 91 EPNdB dès 22h
– Interdiction des aéronefs M<17 dès 22h avec loi du grand père offrant aux compagnies la possibilité
de s’adapter progressivement à la restriction.
En effet, pour chacun des opérateurs historiques, le volume de trafic opéré avec des aéronefs de marge comprise entre 13 et 17 EPNdB durant la période nocturne soumise à la clause d’antériorité (janvier 2026 à janvier 2029), ne doit pas excéder le volume opéré avec des aéronefs de performances acoustiques similaires sur la période de référence.
Scénario B : Scénario A + couvre-feu pour les départs à partir de 23h00
Scénario C : Scénario A + couvre-feu pour les départs et arrivées à partir de 23h00
LE PROJET d’arrete ministériel
Le 29 Avril dernier, le ministère des Transports a rendu public un projet d’arrêté ministériel qui ne retient que le scénario A . Cela s’est accompagnée de l’ouverture d’une Consultation Publique ouverte jusqu’au 29 Juillet prochain : https://www.consultations-publiques.developpement-durable.gouv.fr/consultation-publique-sur-le-projet-d-arrete-a3018.html
Voici ce que dit le projet d’arrêté :
1. Objet du projet d’arrêté soumis à la consultation du public
Le projet d’arrêté soumis à la consultation du public renforce ainsi les exigences environnementales pour les aéronefs opérant sur la plateforme en imposant des restrictions d’un niveau inédit en Europe en matière de performance acoustique.Pendant la période entre 22 heures et 6 heures, les mesures complémentaires sont les suivantes :
- une interdiction des vols des aéronefs de marge acoustique cumulée inférieure à 13 EPNdB ;
- une mise en place progressive de l’interdiction des vols des aéronefs de marge acoustique cumulée inférieure à 17 EPNdB, notamment au travers d’une clause d’antériorité appliquées aux compagnies opérant déjà durant ce créneau horaire ;
- une interdiction des atterrissages pour les aéronefs présentant un niveau de bruit à l’approche supérieur à 97 EPNdB ;
- une interdiction des décollages pour les aéronefs présentant un niveau de bruit au survol supérieur à 91 EPNdB.
Au regard des analyses menées tout au long de l’étude, des réductions des nuisances sonores attendues des différents scénarios de restriction étudiés et des coûts afférents pour les compagnies aériennes, notamment celles possédant une base opérationnelle sur la plateforme francilienne, ce scénario apparaît comme le meilleur compromis entre développement économique et préservation de la qualité de vie des riverains.
Premières réactions
Rappelons qu’en mars 147 communes d’Ile-de-France et de l’Oise ont posé à leurs concitoyens la question suivante : « Pour votre santé et face à l’urgence climatique, souhaitez-vous la réduction des vols et leur interdiction la nuit entre 22 heures et 6 heures sur les aéroports de Charles-de-Gaulle, Orly, Le Bourget et Beauvais-Tillé ? » (consultation réalisée entre le 11 mars et le 24 mars par les communes participantes et par les associations de riverains des aéroports).
Plus de 50.000 personnes ont voté, que ce soit par vote électronique ou dans les urnes mises à disposition par certaines collectivités dans des lieux publics comme les mairies, les centres socioculturels ou les médiathèques. Le taux de participation montre que les habitants se sentent concernés par les questions de nuisances aériennes.
Avec 97% de OUI en faveur de la limitation du trafic aérien et de l’arrêt des vols la nuit, la démonstration est faite que les habitants n’en peuvent plus de supporter pollutions sonores, pollutions atmosphériques et promesses non tenues sur la réduction des gaz à effet de serre du secteur aérien.
Les scénario B et C prévoyaient une extension du couvre-feu à partir de 23h, pour les décollages dans le cas de scénario B et pour les décollages et les atterrissages dans le cas du scénario B.
Le Conseil Départemental de l’Essonne a voté le 25 mars une motion relative au nuisances sonores appelant à un équilibre entre impact économique et bien-être des riverains. Il y est notamment mentionné que les élus du Conseil Départemental :
SAISISSENT le Ministre des Transports pour qu’il engage une concertation territoriale associant, notamment, les populations impactées par la plateforme avant tout choix définitif d’un scénario.
Encore une fois, les élus, les associations, les riverains qui se sont exprimés n’ont pas été entendus.
Aussi l’association DRAPO appelle à participer à la consultation et propose des commentaires à reprendre : voir ici
M< 13, 91 EPNdB, 97 EPNdB c’est quoi ??
Ces valeurs correspondent à des niveaux de bruits mesurés selon la procédure de certification acoustique des avions qui est un standard international émis par l’Organisation de l’Aviation Civile Internationale (OAIC). Il est décrit dans l’Annexe 16 volume 1 de la Convention relative à l’aviation civile internationale.
EPNdB signifie “Effective perceived noise in decibels”, il s’agit d’une mesure de niveau sonore spécifique à cette procédure d’évaluation acoustique des avions.
Ces niveaux de bruit sont enregistrés en trois points au sol décrits ci-dessous.
Le niveau de bruit à l’approche correspond à une situation d’atterissage, le niveau de bruit latéral est la moyenne des mesures en latéral au décollage, le niveau de bruit de survol correspond à une situation de décollage.
Les limites de niveau de bruit acceptées ont évolué avec les progrès techniques, elles sont définies en fonction de la masse selon des chapitres selon la date de certification de l’avion.
La plupart des aéronefs existants se répartissent en fonction de leur date de certification :
Chapitre | Date | Ecart vs Chap.3 | Exemples d’avions certifiés |
aucun | avant | aucun | Boeing 707, Douglas DC-8 |
2 | 1972 |
environ+16dB |
Boeing 727, Mc Donnell Douglas DC-9 |
3 | 1977 | référence | Boeing 737 classic, MD-80 |
4 | 2006 | – 10 dB | Airbus A320, Boeing 737NG, Boeing 767, Boeing 747-400 |
14 | 2017-2020 | – 17 dB | Airbus A320, Airbus A320neo, Airbus A330, Airbus A350, Boeing 737 MAX, Boeing 757, Boeing 777, Boeing 787 |
A partir du chapitre 4 les niveaux sont définis selon des marges cumulées par rapport aux niveaux limites du chapitre 3.
La marge cumulée est la somme des écarts entre les niveaux de bruit mesurés et les niveaux limites de la norme, aux 3 points approche, latéral et survol.
Examen du critère : “Une interdiction des vols des aéronefs de marge acoustique cumulée inférieure à 13 EPNdB”
signifie que les avions qui n’auront pas un écart cumulé d’au moins 13 EPNdB avec les limites du chapitre 3 ne seront pas autorisés à voler entre 22h et 6h du matin.
Nous avons pris en exemple les vols au départ d’Orly du vendredi 5 Juillet entre 22h et 23h30. Nous avons recherché leur immatriculation, en avons déduit le type d’avion exact, et avons cherché un certificat acoustique correspondant sur la base Noise dB de la DGAC.
Le seul problème est que les certifications dépendent des masses au décollage et à l’atterrissage, sur lesquelles nous n’avons pas de données.
Ainsi par exemple pour un B737 800 équipé de moteurs CMF56-7B27 :
Masse au décollage (MTOM) (kg) | Masse à l’aterrissage (MLM)(Kg) | Marge cumulée (EPNdB) |
79016 | 66088 | 11,4 |
65316 | 55337 | 15,3 |
Donc ces B737 seront interdits entre 22h et 6h uniquement s’ils sont pleins ???
Nous avons aussi regardé les mesures de bruit ambiant à mesurés par Bruitparif à Champlan pour ce vendredi 5 juillet , et comparé avec les marges cumulées maxi et mini pour chaque type d’avion :
Sur les diagrammes ci-dessous , en ordonnée sont portés les niveaux de bruit LA max mesurés à Champlan en dB en fonction de l’heure. En rouge les avions pour lesquels la marge cumulée est inférieur à 13 ENPdB, en vert ceux pour laquelle elle est supérieure.
Dans le premier diagramme, nous avons utilisé les marges cumulées minimales trouvées pour ces types d’appareils, et dans le second diagramme, les marges maximales.
En conclusion, cette limite de marge cumulée à 13ENPdB ne permet pas forcément d’écarter les avions les plus bruyants :
les B738 peu chargés passeront au travers
certains avions avec des marges cumulées exigeantes sont quand même au-dessus de 75 dB à Champlan
Examen du critère : une mise en place progressive de l’interdiction des vols des aéronefs de marge acoustique cumulée inférieure à 17 EPNdB, notamment au travers d’une clause d’antériorité appliquées aux compagnies opérant déjà durant ce créneau horaire
Le diagramme des LAmax du vendredi 5 Juillet avec des marges cumulées inférieures à 17 ENPdB en orange est le suivant :
Ce critère à 17 EPNdB est plus pertinent, mais ce ne serait pas appliqué à tous les opérateurs avant 2029
Examen du critère : une interdiction des décollages pour les aéronefs présentant un niveau de bruit au survol supérieur à 91 EPNdB
Ce critère pénalise :
- l’A332, qui est un A330 243 moteurs RR Trent 772B-60, certifié pour des masses au décollage entre 230 000 et 238 000 kg
- l’A339, qui est un A330 941 moteurs RR Trent 7000-72, certifié pour des masses au décollage entre 205 00 et 251 000 kg
(Cf. base de données de certifications acoustiques publique mise à disposition par la DGAC) .
A noter que les A320 et les B738 sont certifiés pour des masses au décollage entre 65 000 et 79 000 kg.
Ce critère de 91EPNdB pénalise donc les plus gros porteurs, même s’ils relèvent du chapitre 14 de l’Annexe 16 .
Etant surtout concernés par le bruit au décollage face à l’Ouest sur le secteur de La Ville-du-Bois, nous n’avons pas regardé le critère sur l’aterrisage.
Notre Avis :
Cet arrêté ne changera pas grand chose à court terme au bruit perçu au décollage par les riverains, puisque les B738 bruyants des compagnies Low Cost pourront y échapper en ajustant leur chargement au moins jusqu’en 2026, voire 2029.
Il ne permettra pas non plus d’atteindre les objectifs du Plan de Prévention du Bruit dans l’Environnement Paris Orly 2018-2023 ( – 6dB entre 22h et 6h du matin pour les zones où l’indicateur Ln est supérieur à 50 dB, division par 2 de l’indicateur de forte perturbation du sommeil , les références étant les niveaux 2018, et l’horizon 2026 estimé de retour au trafic d’avant COVID – en réalité déjà dépassé !!)
Et cela sans parler des critères Ln et du Plan de Gêne Sonore officiels, qui excluent nombre de riverains gênés et sont très en-deça des recommandations de l’OMS. (voir notre Edito Juillet 2022 : le bruit des avions | Bien Vivre à la Ville du Bois (bvvb.org))
AGISSONS !
Nous vous invitons à déposer une commentaire (en cliquant sur le bouton “Déposer votre commentaire” tout en bas de la page en lien) sur la plate-forme de Consultation publique sur le projet d’arrêté portant restrictions d’exploitation sur l’aérodrome de Paris-Orly (Val-de-Marne) | Consultations publiques (developpement-durable.gouv.fr)
Attention, ces commentaires ne seront pas rendus publics. Si vous le souhaitez, ajoutez-les au bas de cet article.
Bonjour,
L’objet de la consultation ne prends pas en considération une demande répété à plusieurs reprises par les riverains à savoir l’élargissement de la durée du couvre feux (requête reprise dans les précédentes consultations).
Cette notion n’apparait nul part dans le contenu de votre consultation. Les riverains dont je fais partie sont nombreux à exiger une plage horaire de couvre feux plus large soit de 22h30 jusqu’à 7h00 du matin.
Par ailleurs il est impératif de limiter le nombre de mouvements.
Enfin il est impératif de prendre en compte dans les mesures proposées le relevé des émissions de CO2 en plus des décibels émis par les avions. Les modalités techniques de mesure et leur pertinences ainsi que leurs analyses doivent être confiés à un organisme indépendant pour assurer une parfaite transparence.
Le gouvernement passe beaucoup de temps à expliquer aux citoyens comment ils doivent se comporter dans leur vie quotidienne pour lutter au mieux contre le changement climatique et ses conséquences il serait temps qu’il s’applique à lui-même les mêmes préconisations.
Tout a fait d’accord avec vous.
A noter que les mesures de bruit sont réalisées par en Ile de France par la structure associative https://www.bruitparif.fr/ , mais dans le projet d’arrêté, il n’est question que des perfomances acoustiques réglementées des avions , pas du tout des mesures de bruit peruçu par les riverains, ce qui est déjà en soi aberrant.